Parole de Black Belt - Bertrand

Bertrand Thai
Découvrez dans cet article le retour d'expérience de Bertrand, Lean Six Sigma Black Belt, à propos d'un projet stratégique réussi, de réduction des coûts de non qualité sur une ligne de production du secteur aéronautique.

Description du problème

Dans le cadre du ramp-up de production d’une nouvelle génération de propulseur aéronautique, une problématique récurrente de non-qualité sur une famille de pièce impactait la montée en cadence. En conséquence, le risque était de ne pas pouvoir fournir nos clients internes en termes de délai. L’impact sur le takt-time de livraison des propulseurs était majeur avec tous les impacts qu’il pouvait y avoir (pénalités, image de marque dégradée…).

Cette non-qualité entraînait des augmentations significatives des cycles ainsi que d’importants surcoûts. Cette situation n’était pas envisageable pour tenir les objectifs industriels en termes de coûts et de délai.

Cette situation représentait un taux de pièces non-conformes de 100%. Le taux de défauts par pièce représentait en moyenne 5kg/pièce. Le coût de cette non-conformité s’élevait à 1M€ correspondant aux retouches nécessaires pour retirer ces défauts (coût retouches matière et prix de la quantité de matière retirée).

Éléments de contexte

Dans un contexte de l’industrie de l’aéronautique en pleine mutation, une nouvelle génération de turboréacteur allait remplacer les anciennes générations. Cette nouvelle génération se veut plus respectueuse de l’environnement par une réduction de consommation de carburant, une diminution des émissions de CO2 et une diminution du niveau sonore du moteur.

Dans ce cadre, une montée en cadence de production s’opérait pour livrer l’ensemble des clients avionneurs.

Ce chantier s’inscrit dans un processus d’amélioration continue global visant à maitriser les procédés de fabrication et produire ces nouveaux propulseurs à des coûts compétitifs.
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Objectifs et moyens mis à disposition

L’objectif opérationnel était de réduire le taux de défauts sur pièce de 40%. Par ricochet, les opportunités de ce projet étaient :
  • Réduction des temps cycles de fabrication,
  • Réduction du lead-time,
  • Réduction des coûts,
  • Maîtrise de la variabilité du process de fabrication.

Lors du cadrage de ce chantier et afin de mener ce projet d’amélioration à bien, il a été convenu avec le comité de direction de mettre les moyens suivants à disposition :
  • Une équipe composée de techniciens, de spécialistes et d’experts avec un temps dédié à ce projet,
  • Une prestation de coaching par un MBB (Master Black Belt) pour support méthodologique et statistique,
  • Un lot de pièces dédié au projet (DOE, mesure des variables…),
  • Un sponsoring robuste du management,
  • Un fort engagement des fournisseurs externes.

Principaux constats du diagnostic

Le projet s’est déroulé via la démarche 6-Sigma. Cette démarche structurée nous a permis de démontrer que la variabilité des produits issus du processus amont était une des causes sur la non-conformité générée. En effet, il n’y avait pas de critères sur les états de surfaces sur lesquels les défauts sont constatés.

Ensuite, sur la base d’analyse statistique, il en ressort que la géométrie n’était pas dimensionnée de manière adéquate.

Enfin, la variabilité de certains paramètres du process de fabrication contribuait ou accentuer le taux de défaut tels que les températures des outillages.

Principales solutions mises en œuvre

Dans le cadre de la démarche 6-Sigma, j’avais mis en œuvre un plan d’expérience afin d’identifier les conditions du process dites optimales pour réduire le taux de défaut. L’optimisation a été identifiée sur la géométrie et état de surface des produits issus de l’opération amont. Ensuite, ce plan d’expérience a permis de mettre en évidence que certaines pratiques opératoires sont plus favorables à fabriquer des pièces exemptes de défauts. Ainsi, nous avons identifié le mode optimal de rotation des outillages, l’amélioration du processus de chauffe des outillages pour créer les meilleures conditions de fabrication.

Afin de mettre sous contrôle le process, des cartes de contrôle ont été implémentées sur les paramètres clés de fabrication ainsi que sur le process amont chez le fournisseur.

De plus, avec l’objectif de figer les meilleures pratiques, nous avons également entrepris la mise en place de standards concernant les process de grenaillage avec le tolérancement des paramètres clés, les opérations d’émaillage avec pour objectif de garantir l’intégrité du produit avant transformation notamment par la mise en place de spécifications sur la préparation des produits et des modes de manutentions et de stockage.

Enfin, nous avons également stabilisé les opérations en forge en standardisant les modes de contrôle du process en production.

Retex à propos de la conduite du changement

Paradoxalement, les différentes actions d’amélioration et la mise en œuvre des solutions n’ont pas été confrontées à de la résistance au changement. À noter que lors du lancement de ce groupe de travail, j’avais fait part de l’importance que les managers des différents membres s’engagent à libérer et allouer la disponibilité des ressources.

Ce projet confirme l’importance de l’engagement du système de management pour une conduite du changement réussie en apportant leur confiance et leur support.

Le management s’était engagé à ce que tous les membres de l’équipe puissent être disponibles pour le projet réduisant ainsi les risques de conflit d’activité.

Le tout était agrémenté d’un état d’esprit Kaizen permettant d’aller au-delà des idées préconçues et favoriser la génération d’idées sortant du cadre et nous ayant permis d’atteindre le résultat escompté.
Et en bonus, j’avais des ressources financières pour mettre en place des campagnes d’essais (mise à disposition de pièces « martyrs », budget pour essais chez des fournisseurs, budget pour campagne d’essais en production…).

Telle est la conclusion de mon retour d’expérience pour une conduite du changement réussie à savoir un fort appui et support du management.

Résultats obtenus et durée du projet

En sortie de projet le taux de défaut/pièce a été divisé par près de 3 correspondant à un gain financier de 60% sur une cadence de production nominale.

Le projet a duré environ 1 an.

Ce que tu as appris

Pour conclure, je dirai que l’importance d’avoir de la « mesure » est indispensable pour démontrer et argumenter factuellement sur les causes de non-qualité. Elles ont naturellement contribué à aider à la décision des actions d’amélioration à mettre en œuvre.


Par voie de conséquence, c’est un projet où j’ai pu renforcer mes compétences statistiques et comprendre la puissance de la démarche 6 Sigma pour résoudre ce problème.


Enfin, il est primordial d’être sur le terrain pour voir et comprendre les contraintes et la vision des opérationnels. Lors de ce projet, chaque solution a été construite avec ces derniers pour s’assurer d’une bonne faisabilité et d’une bonne appropriation.

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À propos de l'auteur

Bertrand Thai
Fort d’une expérience opérationnelle de plus de 10 ans dans l’industrie métallurgique et mécanique dans les secteurs de l’aéronautique et de la métallurgie, Bertrand a eu l’opportunité de relever différents challenges à travers des projets d’amélioration continue, de réduction de la non-qualité ou de transformation organisationnelle.