La norme ISO 9001 favorise-t-elle l’amélioration continue ?

Damien Philippe
Norme et amélioration continue : deux termes à priori incompatibles.

Découvrez dans cet article en quoi la norme ISO 9001 sert au contraire pleinement, la démarche de progrès.
Le temps où l’on vivait dans un monde relativement stable, comme c'était le cas à la fin du 20ème siècle, semble bien loin. À cette époque, nous pouvions planifier les activités avec un bon niveau de confiance et nous pouvions mettre en œuvre sereinement ce qui avait été décidé des années auparavant. La norme ISO 9001 de 1987, avec son lot de formalisme, était reine car elle offrait des gages quant à la maîtrise des processus et quant à la qualité des produits et services livrés.

Aujourd’hui nous sommes entrés dans le monde VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity). La volatilité, l'incertitude, la complexité et l'ambiguïté font partie de notre quotidien. Ce nouveau monde ébranle fortement les organisations qui doivent s'adapter continuellement. Les chaînes d’approvisionnement se cassent. Les processus et les procédures établis à un moment donné deviennent obsolètes le lendemain.

Au premier abord, on pourrait croire que la norme ISO 9001 est trop rigide, voire incompatible avec ce contexte évoluant constamment. Mais détrompez-vous, la norme a, elle aussi, beaucoup changé. La dernière évolution, en date de septembre 2015, a même, à ce titre, été une révolution.

Les organisations, certifiées ou non, ayant adopté les pratiques de l’ISO 9001:2015 ont sans doute bien mieux géré les événements tels que la pandémie et la guerre en Ukraine, que celles qui ne l’ont pas fait.

Mais qu’est ce qui explique que la norme 9001:2015 soit si profitable à la dynamique d’amélioration continue ?

La norme offre des gisements de progrès inépuisables

Gisement n°1 : Les activités de surveillance comme source d’amélioration

La norme impose la mise en place d’un système de management de la qualité. Or un système qualité produit par nature de multiples informations grâce aux activités de surveillance.

On pourra citer :
  • les résultats d’audits qualité,
  • les résultats des enquêtes de satisfaction client,
  • les indicateurs qualité,
  • les constats de non-conformité. 


Toutes ces informations peuvent déclencher des actions correctives et préventives. Ces actions d’amélioration décidées régulièrement fournissent des gains de performance en améliorant la satisfaction client. 

Au-delà des gains sur la satisfaction client, ces informations documentées permettent également d'identifier des gains de productivité. En effet, lors des audits des opportunités d’amélioration sont souvent découvertes, les indicateurs qualité sont souvent revus en même temps que d’autres indicateurs de production ce qui amène également des changements.

Le système qualité,  en tant que pourvoyeur de progrès entraîne l’organisation à changer. Les collaborateurs s'habituent à évoluer et à concevoir des processus flexibles. Ainsi les freins aux changements s'estompent peu à peu ce qui rend l’entreprise plus apte à s'adapter.

Gisement n°2 : Les risques comme source de progrès

La norme donne un cadre de réflexion qui privilégie la prévention. "Il vaut mieux prévenir que guérir". Ainsi le rôle de prévention du SMQ (Système de Management de la Qualité) doit être assuré par une gestion des risques performante. La notion de risque, définie comme l’effet de l’incertitude, correspond, dans le cadre de la norme ISO, à des événements non souhaités pouvant impacter la satisfaction client. Prévenir les risques implique nécessairement la réalisation de plans d’action d’élimination ou de mitigation des risques. Ces actions sont également de véritables gisements de progrès qui permettent de gérer les problèmes avant même leur apparition. 

De façon générale, les actions de prévention qualité gagnent en pertinence. En adoptant ce type de raisonnement par les risques, on améliore la gestion des ressources en allouant les ressources aux bons endroits, c’est-à-dire là où les risques revêtent l’importance la plus élevée. On ne mettra pas en place de mécanismes de protection et de surveillance lourds sur ce qui a un risque très faible de survenir. Cela va donc considérablement alléger les processus et la gestion documentaire...

Finalement tout cela est "très Lean" !

La norme demande également de gérer ce que l’on appelle des opportunités. Selon le Larousse, il s’agit "d'occasions favorables". Pour transformer ces occasions en améliorations concrètes il sera nécessaire d’identifier prioritairement celles qui impactent la satisfaction client et de mener les actions nécessaires.

Bien évidemment ces opportunités ne se limitent pas à la satisfaction client et peuvent concerner des sujets bien plus larges. 

Le management des risques et opportunités pourra avantageusement être déployé sur le spectre plus large de l'excellence opérationnelle. Les plans d’actions qui en découlent viendront alimenter la dynamique globale d’amélioration continue

Gisement n°3 : L’approche processus comme unité de gestion de la performance

Selon l’ISO 9001 , l’approche processus est un des fondements d’un SMQ. Cela amène l’organisme à réfléchir activement aux flux de production. Ainsi la chaîne de valeur amenant à la satisfaction client est clairement établie et peut être pilotée efficacement dans son ensemble mais également par unité. En effet les processus constituent des noyaux de performance qui peuvent être optimisés individuellement.

L’approche processus impose trois principes de pilotage clés :
  • la mesure de la performance,
  • l’amélioration permanente des processus sur base des mesures,

  • l’analyse systématique et continue des risques et des opportunités d'amélioration.


Avec ces principes, la norme ISO 9001:2015 ancre davantage l'amélioration continue au cœur des organismes.  
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Des documents pertinents et faciles à gérer

La version 2015 de la norme a abandonné les exigences d'un système documentaire lourd qui mettait un point d'honneur à formaliser un maximum de savoirs.

Ces exigences, quoique pertinentes dans le passé, deviennent aujourd'hui un frein à la production d’amélioration. Grâce à la version 2015, on sort de la pure logique qui encourageait à démultiplier les procédures et à généraliser l'usage du tampon sur chaque bureau. Aujourd’hui, les documents sont devenus des "informations documentées". Il n’est donc pas nécessaire d’avoir des documents physiques ; l’accent est mis sur l’information et non le format ou le support. Le manuel lui-même n’est plus une exigence absolue.

Les organismes doivent toutefois être capables de démontrer l’efficacité de leur SMQ avec les éléments documentaires qu’ils jugeront nécessaires. Les entreprises sont donc responsabilisées quant aux livrables qu’elles doivent produire. Pour faire ces choix, l'entreprise doit analyser les éléments critiques pour la satisfaction client et cibler la production documentaire à ce qui est strictement nécessaire. Ainsi le système devient plus facile à entretenir et à faire évoluer au gré des améliorations. Il devient plus agile.

On le voit ici l’application de la norme ISO 9001:2015 offre un terrain fertile à la systématisation de l’amélioration continue. Elle agit en favorisant l’émergence de gisements de progrès comme source continue d’amélioration.

Elle donne de la pertinence aux actions par l’analyse de risques. Elle ancre également profondément les mécanismes d’amélioration dans le quotidien avec le management des processus.

Elle allège aussi les exigences documentaires pour un maximum d’agilité dans un contexte mouvant. La norme ISO 9001 agit en synergie avec les démarches d’amélioration de type Lean et Six Sigma en leur servant de socle et en renforçant la pérennité des avancées.
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À propos de l'auteur

Damien Philippe
Lean Six Sigma Black Belt, je suis passionné par l'amélioration continue et collective de la performance.

Cofondateur de Lean en ligne, je suis animé par la volonté de transmettre mes connaissances et de partager mon expérience de praticien.